Rencontre – débats – Les jouets sont éternels
InvitationLe sociographe et l’IRTS Ile-de-France Montrouge Neuilly-sur-Marne vous invitent à une rencontre-débat avec les auteurs du dernier numéro intitulé Les jouets sont éternels le jeudi 6 juin 2013 de 14h à 17h.
Cette demi-journée s’adresse aux étudiants et professionnels du secteur social et médico-social. L’animation est assurée par Irène Kontomichos, formatrice à l’IRTS, en charge de la coordination du numéro et par Guy-Noël Pasquet, rédacteur en chef du sociographe.
En matinée : exposition Jouets fabriqués par les étudiants éducateur de jeunes enfants. On peut regarder avec les yeux et… avec les mains !
Le jouet ce n’est pas que pour les enfants !
Le jouet est une rencontre du monde, de son étrangeté, de son altération. Utilisé comme un outil éducatif, thérapeutique, il est parfois réduit à une fonctionnalité alors qu’il est création et construit le sujet. Un sujet qui parfois devient jouet, à son tour objet manipulable à souhait lui aussi. Mais là, ce n’est peut-être plus du jeu !
Les auteurs présents
Marie-Josée Gacogne – Voir la vie en grand.
Comment les jouets aident à grandir : épopée de la vie du jouet de sa naissance à aujourd’hui.
Extrait – Début du texte.
Partager avec vous ce que représentent les jouets dans une vie d’enfant puis d’adulte est l’occasion pour moi d’évoquer mon parcours professionnel orienté vers le travail social et plus particulièrement la petite enfance, en tant que jardinière d’enfants puis éducatrice de jeunes enfants dans un service de pédiatrie générale et d’oncologie pour enfants, enfin comme formatrice et responsable pendant quelques années de la formation des éducateurs de jeunes enfants, au sein d’un IRTS – Institut régional de travail social.
Le nombre d’ouvrages éminents déjà existants sur les jouets, notamment ceux de Michel Manson et de Gilles Brougère, sans oublier la revue Le Furet qui consacre régulièrement des articles de qualité sur les pratiques des enfants et des professionnels autour du jeu, a orienté mon angle d’attaque pour parler des jouets. Il ne s’agissait pas de tout traiter ou de redire ce que d’autres avaient déjà écrit, mais de donner un tour ludique à cette aventure d’écriture, en mêlant connaissances livresques, exemples professionnels et quelques souvenirs plus personnels.
Disons tout d’abord que cette attention aux jouets révèle une attention aux enfants par les adultes qui les entourent et qui les accompagnent pour les aider à grandir.
Corinne Chaput – Le chien en peluche de Philippe Grimbert.
Lorsqu’un jouet caché du passé fait re-vivre et fait naître une histoire jusque là mal connue… et comment il donne sens aux émotions.
Extrait – Début du texte.
Les jouets déposés dans les tombeaux égyptiens avaient cette faculté de faire passer nos ancêtres du monde des vivants au monde des morts.
Plus près de nous, un jouet déposé dans une chambre de service d’une demeure cossue de Paris a permis à un enfant de passer du monde des morts au monde des vivants. Tel fut le cas, en effet, de Simon, demi-frère aîné de l’écrivain et psychanalyste Philippe Grimbert, arrêté et déporté avec la première épouse de son père alors qu’ils essayaient de s’enfuir en zone libre et d’y rejoindre le reste de leur famille.
À partir de cette illustration saisissante du rôle que peuvent jouer les objets dans l’absence des mots, cet article a l’ambition de montrer comment un jouet, objet transitionnel par exemple, peut assurer la période de transition entre la mort et le récit de la mort, peut favoriser les transpirations du secret, peut clore, enfin, la volonté somnolente du sujet à dire le malheur suprême.
Là où les pharaons d’Égypte emportaient les jouets de leur enfance du monde des vivants vers le monde des morts, les jouets que l’on conserve peuvent faire revenir ceux que l’on aime, et qui ont disparu, dans notre monde des vivants pour quelques minutes ou quelques heures volées à l’ensevelissement du temps et à l’oubli. Ils peuvent agir comme des transpirations du secret et favoriser la transmission.
Madeleine Pottier – La force du jeu.
Ces objets du quotidien de l’enfant : poupées, animaux qui permettent la mise en scène de scénarii dans lesquels l’enfant va pouvoir laisser vivre sa sensibilité.
Extrait – Début du texte.
Il était une fois des enfants qui jouent.
Des enfants qui jouent à travers des poupées, des animaux, des histoires incroyables, des scénarios de vie et de mort, de violence et de réconciliation, qui parlent fort ou chuchotent, qui font corps avec leur personnage, qui s’arrêtent un temps dans leur territoire, qui écoutent, font dormir la poupée, l’animal, puis repartent entraînés par l’énergie du groupe.
Il était une fois des animaux qui se rencontrent, qui se cherchent ou se repoussent, qui font alliance, palabrent… il était une fois des animaux qui sèment, plantent pour se nourrir, qui soignent, donnent leur lait, se caressent… Il était une fois une fontaine qui étanche la soif, qui empoisonne ou donne l’eau de la vie, qui sert de lieu de ralliement.
Il était une fois des poupées : le bébé, la grande, l’handicapée, la blonde, le garçon et d’autres…, qui ont leur maison, sont soignées, dorlotées ou rejetées. Il était une fois la poupée qui s’est sauvée de chez ses parents, celle qui vomit des cafards partout, celle qui donne des coups de boule, celle qui se fait coiffer et celle qui est oubliée chez la nourrice…
Il était une fois des enfants qui se retrouvent en petits groupes, régulièrement, et qui chaque fois, vivent des histoires différentes, ou semblables, des scénarios qui surgissent comme une tornade, une trombe d’eau.
Marie-Gabrielle Mathely – Arrête de jouer, va travailler !
Dans notre société où une grande place est offerte aux apprentissages, quel espace reste-il au jouet pour jouer ?
Extrait – Début du texte.
J’ai encore cette petite phrase dans les oreilles ! Lorsqu’elle résonnait, elle annonçait, pour moi, à la fois la fin d’un temps que ma famille qualifiait d’insouciant et le début d’un autre temps, parfois plus difficile, car il me fallait devenir sérieuse ; mais pour moi, enfant, lorsque je jouais, c’était sérieux aussi !
Ce n’est peut-être pas pour rien que je suis devenue éducatrice de jeunes enfants – EJE – un métier trop souvent défini par cette formule rapide : ” vous, les EJE, vous passez votre temps à jouer !” Mais pour moi, le jeu c’est sérieux, et c’est tellement sérieux que je m’en sers de plus en plus dans mon métier de formatrice, notamment pour accompagner les étudiants en travail social dans leur rapport à l’écriture.
Jouer pour jouer, pas pour gagner. Cette phrase, dite par Phileas Fogg dans le livre de Jules Verne, 1873 – Le tour du monde en 80 jours – résume bien l’idée que je me fais du jeu. Jouer, pour un enfant, est une activité complètement naturelle ; elle n’est pas, comme chez l’adulte, un dérivatif de son existence ; elle est tout simplement sa vie et, surtout, elle est son développement. Le jeu, c’est un rouage, une mobilité, une possibilité, un espace ; bref, pour moi, c’est un agir complet qui mobilise des capacités sensorielles, motrices, cognitives, affectives.
Gilles Brougère – Les jouets et la rhétorique de l’éducation.
Le jouet comme objet éducatif. Mais, sa fonction première est-elle une rencontre pédagogique ou le plaisir de l’expérimentation, de l’exploration, support de l’apprentissage ?
Extrait – Début du texte.
Les jouets sont-ils éducatifs ? Quelle relation peut-il y avoir entre objet et le fait d’apprendre ? Ces interrogations accompagnent souvent le discours sur le jouet et sont prises dans une tension qui montre comment une telle question est mal posée, voire dénuée de sens.
En effet, les réponses contradictoires renvoient à deux idées – qui peuvent parfois allégrement se mêler : tout les jouets sont éducatifs – c’est d’ailleurs indiqué sur la boîte.
Deux discours : l’idée que tous les jouets sont éducatifs renvoie à la conception de l’activité ludique comme éducative en elle-même, vision mythique de jeu qu’il convient d’interroger comme nous avons pu le faire avec d’autres auteurs – Brougère, 2005. Si jouer permet d’apprendre, de se développer, de s’épanouir, de grandir selon le type de discours voire les modes du moment, il n’y a pas lieu de distinguer des jouets ou jeux éducatifs qui peuvent être critiqués soit par leur dimension commerciale, du fait de leur utilisation de l’argument éducatif pour vendre, soit par leur côté fermé et limité du point de vue ludique. Tout jouet, sous réserve qu’il permette un jeu effectif, est de fait éducatif, ou bien la question ne se pose pas, car ce n’est pas le jouet qui est éducatif, mais l’activité qu’elle se fasse avec un jouet ou tout autre objet récupéré, utilisé par l’enfant. Les jouets non éducatifs sont ceux avec lesquels on ne joue pas ou mal.
Jean-Christophe Panas – L’apprenti démocrate.
Quand le joueur devient l’instrument du jeu, jusqu’à en devenir le jouet.
“L’enfant et les sortilèges” fut mis en scène par Clélia Pirès, sous forme d’une pièce de théâtre musicale avec des jeunes filles d’un institut de rééducation – ex Institut thérapeutique éducatif et pédagogique – ITEP – aux alentours de 1992. Colette et Ravel permirent à ces enfants au fort caractère de se confronter à la très dure réalité d’apprendre à chanter un texte et à en restituer ses émotions.
Demander à des enfants de s’incarner en horloge comtoise, en théière ou en soucoupe, voilà qui supposait un talent pédagogique pour le moins hors du commun. La précision du jeu était la condition sine qua non pour épurer le jeu des acteurs, en gommer ses maladresses. Le jeu était sérieux. Être un écureuil ou une horloge comtoise fut un travail de conviction et de passion de plus d’une année. Répéter, répéter, reprendre le moindre détail, chanter juste, retenir, faire travailler sa mémoire, avoir la juste intonation était le prix à payer pour enfin avoir le droit de se présenter devant un public inconnu.
La première représentation eut lieu en avant-première au sein même de l’établissement. À cette occasion, la plus grande salle fut érigée en salle de spectacle.
Le Sociographe
Les jouets sont éternels. Médiation initiation, sujétion
N°41, mars 2013, 144 p., 12€, Champ social édition.
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L’exposition des étudiants
Pour cette journée consacrée au jouets, les 1ères années éducateurs de jeunes enfants ont exposé leurs jouets… fabrication maison, récupération de matériaux très divers…
On doit jouer, toucher, regarder… et on a aussi, des explications : se repérer dans l’espace, mémoriser, catégoriser… ou plus sensitif : explorer, sentir, secouer, aplatir…
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Contact & lieu
Entrée libre.
Irène Kontomichos
+33 (0)1 40 92 35 19
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IRTS Ile-de-France Montrouge Neuilly-sur-Marne
Amphi TOM
1 rue du 11 novembre
92120 Montrouge
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En cela, Le Sociographe se propose d’exploiter tous les éléments qui traversent la question sociale, pour contribuer à tracer ce qui pourrait faire objet commun entre recherche de terrain, écrits de formations et collecte de témoignages socio-graphiques. Il nous reste a inventer une socio-graphie comme ce qui pourrait être une épistémologie du témoignage . Toute réalité sociale et historique ne se dévoile-t-elle pas par le jeu des valeurs accordées ou non à des témoignages ?
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Photos : Marie Christine Girod – Comité rédactionnel IRTS – 19 décembre 2012.